Bilal Chatra, l’éclaireur du 13 novembre

Sur le papier, le plan adopté par la cellule chargée des opérations extérieures de l’État Islamique, consistant à infiltrer les opérationnels du 13 novembre dans le flux de centaines de milliers de migrants en train de se déverser de manière incontrôlable sur l’Europe à partir de l’été 2015, peut paraître simple, encore fallait-il s’assurer en amont d’un itinéraire fiable à emprunter en toute sécurité. C’est le rôle qui a été dévolu au jeune Bilal Chatra. Bilal Chatra n’était pas dans le box des accusés au procès des attentats du 13 novembre. Il a été jugé, en compagnie d’Ayoub el Khazzani, Redouane Debar, et Mohammed Bakkali, dans le cadre d’une autre procédure, pour son rôle dans l’attentat manqué du Thalys du 21 août 2015, et condamné à 27 ans de prison au terme de ce premier procès qui s’est tenu à la fin de l’année 2020. Le travail de repérage qu’il a accompli en cette occasion a néanmoins été essentiel dans le succès de l’opération du 13 novembre 2015, trois mois plus tard, raison pour laquelle nous l’intégrons à cette galerie de portraits. Il a été auditionné par visioconférence le 3 mai 2022 au procès des attentats du 13 novembre, se réfugiant, comme Mohamed Bakkali, derrière son droit au silence, se contentant d’un laconique « J’ai rien à dire, je garde le silence », mais a été beaucoup plus prolixe lors du procès du Thalys. L’essentiel des informations dont nous disposons le concernant nous viennent donc de ces six semaines de procès, synthétisées par l’Association française des victimes de terrorisme, qui les a mises en ligne sur la toile ( 1/ 2/ 3/ 4).

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Farid Kharkhach, un petit poisson piégé sans la nasse du 13 novembre

Afin d’être complet, il me faut intégrer à la série d’articles sur les protagonistes des attentats du 13 novembre trois acteurs mineurs qui forment une catégorie à eux tout seuls. Voici donc la pièce n°14 qui retrace le parcours de Farid Kharkhach qui a comparu au procès des attentats en 2021/2022 pour avoir vendu à l’un des terroristes des attentats de Bruxelles du 22 mars 2016 trois faux-papiers pour un bénéfice dérisoire. Le cas de Kharkhach est une excellente illustration du caractère impitoyable de l’accusation d’association de malfaiteurs terroristes, qui ne fait au départ des procédures aucune distinction entre les acteurs les plus impliqués et les complices les plus incertains. Au terme de la procédure notre faussaire sera certes libéré, et innocenté de toute complicité dans ces carnages, mais auparavant il aura passé cinq et demie en prison dans des conditions très difficiles. Il est bien plus sûr en République de participer avec enthousiasme à des massacres de Palestiniens dans les rangs de Tsahal…

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Ibrahim et el Khalid el Bakraoui, deux truands « rachetés » par la bombe

les frères Ibrahim et Khalid el Bakraoui (source image : AFP/Interpol)
Ibrahim el Bakraoui
Khalid el Bakraoui

Toute l’existence des frères el Bakraoui – deux des trois kamikazes des attentats de Bruxelles du 22 mars 2016 – depuis l’âge de raison jusqu’à leur dernier souffle, a été consacré au crime sous toutes ses formes, la découverte très tardive et partiale de l’Allah de Daech en prison, à la fin de l’année 2014, n’ayant fait que décupler ce penchant antisocial. L’aîné, Ibrahim – 29 ans au moment des événements – est né le 9 octobre 1986, le cadet, Khalid est né deux ans plus tard, le 12 janvier 1989. Ils sont les cousins d’Oussama Atar, commanditaire présumé des attentats du 13 novembre, dont le frère Yacine est présent dans le box des accusés, parce que c’est son frère. Ibrahim est un ami d’enfance d’El Haddad Asufi, également présent dans le box. C’est Khalid qui a loué sous une fausse identité l’appartement de Forest où se planquait Salah Abdeslam depuis les attentats du 13 novembre en compagnie de deux complices, jusqu’à l’intervention surprise de la police belge le 15 mars 2016, qui a déterminé les frères el Bakraoui, Najim Laachraoui, et Mohamed Abrini – présent dans le box des accusés – à précipiter la mise en œuvre des attentats de Bruxelles du 22 mars.

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Les présumés fournisseurs des armes du 13 novembre

Une kalachnikov démontée

Qui a fourni les armes qui ont permis aux trio des terrasses et au trio du Bataclan de commettre le carnage que l’on sait ? Nous ne parlons pas ici des gilets explosifs, qui ont été confectionnés par Ahmad Alkhald, dans l’appartement conspiratif de Charleroi, à partir de matériaux que chacun peut se procurer librement dans le commerce, mais des six kalachnikovs et de leurs chargeurs. Comme pour le massacre de Charlie Hebdo 55 (( Nous avons longuement exposé ce point dans notre ouvrage Le massacre de Charlie Hebdo, l’enquête impossible, pp. 284-305 )), l’origine des armes qui ont servi à tuer est l’un des points les plus obscurs de la procédure des attentats du 13 novembre. Les magistrats belges puis français qui ont instruit l’affaire ont jeté leur dévolu sur deux suspects en particulier, Ali El Haddad Asufi, et Mohamed Bakkali, et le moins que l’on puisse dire – ce qui n’ôte rien à la complicité des deux hommes à un niveau moindre – c’est qu’après cinq années d’instruction, et neuf mois de procès, ce rôle cardinal des deux hommes, qui leur a valu une très lourde condamnation, est encore loin d’avoir été irréfutablement démontré.

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