L’inversion accusatoire selon Rudy Reichstadt en 20 citations

Introduction

Me trouvant la cible d’une plainte en justice pour mon ouvrage consacré à L’anticonspirationnisme mis à nu à travers l’imposture Rudy Reichstadt, publié à l’automne 2021, diffamé dans son opuscule Au cœur du complot publié aux éditions Grasset en mars 2023, enfin l’objet d’une de ses calomnieuses « notices d’information » depuis novembre 2023, sur son site Conspiracy Watch, j’éprouve le besoin de mettre certaines idées au clair et remettre à l’endroit certains faits et vérités. Après avoir parcouru cette notice de délation, sujet du précédent article, j’ai deviné utile de relire son premier ouvrage anticomplotiste publié chez le même éditeur en septembre 2019, L’opium des imbéciles. Encensé par la classe médiatique unanime lors de sa parution, je l’avais qualifié dans mon livre de « synthèse de la littérature anticomplotiste dans tout ce qu’elle peut manifester de plus impersonnel et de plus caricatural », dont l’« inanité et [l]a perversité intellectuelle éclatent à chaque page. » En le reparcourant j’ai été de nouveau frappé par la prolifération de termes injurieux envers les « complotistes » (Cf article précédent), l’absence complète de démonstration, le refus de se confronter au détail des affaires les plus graves qu’il évoque, l’invocation à tout propos d’autorités littéraires, philosophiques, sociologiques, souvent hors sujet avec le thème de l’ouvrage mais donnant l’impression trompeuse d’une érudition vaste et exigeante. J’ai été surtout frappé par le recours extrêmement fréquent à un procédé que j’ai eu l’occasion – avec d’autres – de signaler à maintes reprises ces dernières années, portant le nom d’« inversion accusatoire ». Particulièrement ignoble, l’inversion accusatoire consiste à accuser son adversaire des maux et turpitudes dont on est soi-même le véhicule et acteur. En psychologie, il existe un mécanisme inconscient qui porte le nom de « projection », le cas de figure le plus banal consistant à dénoncer maladivement chez autrui ses propres défauts que l’on est incapable de reconnaître et assumer. La projection et l’inversion accusatoire sont cousines, mais dans l’inversion accusatoire il y a une nuance de taille. Quand vous reconnaissez le procédé employé publiquement, dans les médias et dans des ouvrages, par les mêmes individus, membres d’une même secte, pendant des années et des années, en toute impunité et avec un enthousiasme de plus en plus féroce, vous finissez par vous rendre à l’évidence qu’il s’agit non pas de la manifestation d’un trouble psychiatrique inconscient, mais d’une martingale consciemment appliquée, dans le cadre d’une entreprise de portée plus vaste, dont l’un des impératifs catégoriques est la démonisation d’adversaires aux yeux du grand public. La notice que m’a consacré en novembre 2023 Conspiracy Watch – et en fait sans doute la plupart des 600 notices publiées à ce jour sur ce site – en est une excellente illustration. Comme je l’ai mis en lumière dans l’article précédent, l’objectif d’une telle notice – financée notamment grâce à la subvention du fonds Marianne mis en place en réponse à l’assassinat de Samuel Paty – n’est pas de présenter au grand public un portrait résumant honnêtement mon travail et mon parcours, mais de picorer dans l’âpre chemin parcouru depuis près de 15 ans, qui plus est en les déformant, les seuls éléments susceptibles de décrédibiliser et inspirer l’horreur, en passant sous silence, minorant ou déformant tout ce qui pourrait donner au contraire une bonne image, ou plus banalement une image normale.

En relisant, donc, L’opium des imbéciles (2019), j’ai été de nouveau frappé par ce recours systématique à l’inversion accusatoire, et comme j’avais déjà procédé il y a quelques mois, dans le cadre de la préparation de mon ouvrage sur Le fonds Marianne et les charognards de Samuel Paty, qui paraîtra en mai aux éditions Kontre Kulture, au relevé de tous les extraits s’apparentant à ce procédé dans son opuscule Au cœur du complot (2023), je me suis dit en fermant la dernière page qu’il serait instructif de présenter aux lecteurs un ensemble de citations emblématiques de ce procédé, en les assortissant à chaque fois d’un commentaire plus ou moins développé.

L’échantillon de 20 extraits ici exposé est très loin d’être exhaustif, et si j’ajoutais à ce corpus de deux ouvrages l’ensemble des interventions de Rudy Reichstadt dans les médias ces dix dernières années, j’aurais de quoi remplir un volume entier. L’inversion accusatoire est en effet pour lui comme une seconde nature qui s’exprime à tout moment : on ment, pour mentir, pour le plaisir de mentir, et parce qu’il s’agit d’une valeur. Si l’on a été éduqué avec des valeurs traditionnelles de travail, d’honnêteté, de mérite, de compassion, d’horreur du mensonge, on est d’abord incrédule en découvrant l’existence d’un tel procédé, et d’autant plus incrédule que les acteurs anticomplotistes n’hésitent jamais en même temps à se draper dans de grandes « valeurs » comme la Démocratie, la République, la Liberté d’expression, la Laïcité, la Tolérance, l’Antiracisme, la Mémoire de la Shoah, ce qui n’est rien d’autre, tout bien réfléchi, qu’une variante naturelle de l’inversion accusatoire : quelle différence au fond y a-t-il en effet entre prêter à ses adversaires ses propres vices et se parer de vertus qui ne sont pas les siennes ? C’est cohérent.

Avant d’entamer le passage au crible de ces 20 extraits, je veux faire une mise au point concernant le terme d’« anticomplotisme » qu’il m’arrive d’employer soit dans les commentaires, soit dans les passages que je m’efforce de remettre à l’endroit en n’en changeant qu’une poignée de termes. Il ne s’agit nullement d’un terme fumeux et injurieux mais d’un terme technique à la dénotation rigoureuse. Les acteurs anticomplotistes, êtres de haine qui ont un goût prononcé pour l’injure et l’invective, ont en effet tendance à englober tous leurs ennemis politiques sous une ribambelle d’étiquettes infamantes, dans le cadre d’une stratégie consciente et perverse de démonisation. C’est ainsi que les anathèmes d’antisémites, révisionnistes, extrémistes, négationnistes… et complotistes – dans le précédent article j’ai employé la métaphore des cinq saucisses du pentagone anticomplotiste –, reviennent incessamment en salves dans leurs bouches. Chez quelqu’un comme Rudy Reichstadt on frôle, non on ne frôle pas on est, dans la caricature. En même temps ils mettent tous leurs adversaires dans le même sac, n’entrent jamais dans le détail de leurs parcours et leurs travaux, passent soigneusement sous silence les plus consensuels d’entre eux, prennent bien soin de disposer dans la vitrine d’infamie uniquement ceux qui ont déjà été complètement diabolisés par leurs soins, et/ou condamnés par la justice au terme de procès iniques – condamnations que l’on ne se prive jamais ensuite de rappeler comme des preuves irréfutables et définitives de leur dévoiement. Tous ces individus qui s’acharnent indistinctement sur les « complotistes », en le revendiquant haut et fort, se signalent eux-mêmes mécaniquement comme « anticomplotistes » : les complotistes n’existent pas mais les anticomplotistes existent.

Les complotistes existent d’autant moins que le terme « complotiste » est lui-même une inversion accusatoire. Comme je l’ai expliqué dans mon ouvrage consacré au Massacre de Charlie Hebdo, l’enquête impossible :

« En français et dans de nombreuses langues, le suffixe « iste » à plusieurs significations et connotations bien précises : 1) Une qualité professionnelle, un spécialiste de : un ébéniste, un flûtiste, un pianiste, un herboriste, un artiste, un paysagiste, etc. 2) un partisan ou un fidèle : un bouddhiste, un communiste, un chaviste, un bachariste, sarkozyste, un trotskiste, un frankiste, un sandiniste, un anarchiste, un nationaliste, un impressionniste, un dadaiste, etc. 3) un trait de caractère : idéaliste, nihiliste, optimiste, conformiste, égoïste, etc. Si l’on suit la règle, le « conspirationniste » serait, au choix : un professionnel ou un spécialiste de la conspiration (ou du complot) ; un amateur, un passionné de conspirations (au sens de participant); une personne ayant tendance à comploter et conspirer. Nous nous trouvons confrontés d’emblée au dilemme suivant : les termes « complotiste » et « conspirationniste » sont des néologismes dans lequel l’usage du suffixe -iste- ne correspond pas à son usage traditionnel ou le plus courant. (…) Un premier mensonge apparaît donc avant même d’entrer dans le cœur du sujet : les termes « conspirationniste » et « complotiste » sont des termes frauduleux comme sont frauduleux les procédés employés par les acteurs AC pour dénoncer ceux qu’ils nomment par la qualification qui pourrait bien plutôt être la leur : il s’agit d’une inversion accusatoire ; au sens premier du terme, les acteurs AC sont les seuls « complotistes » ou « conspirationnistes ». » (p.140-141)

20 exemples d’inversion accusatoire chez Rudy Reichstadt

1) « Quant aux exagérations, aux boniments, aux mensonges, aux spéculations oiseuses et aux contrevérités dont les complotistes truffent leurs propos, ils représentent aujourd’hui pour leurs auteurs un coût à peu près nul. Celui de leur réfutation scrupuleuse critique en revanche qui implique un investissement intellectuel souvent lourd et ingrat, est particulièrement élevé. » L’opium des imbéciles, p.160

j’inaugure naturellement cette série de citations par l’une des deux qui ont servi de fil directeur à mon précédent article, dans lequel j’ai démontré que ma notice de personnalité concoctée par les inquisiteurs de Conspiracy Watch constituait une fraude perverse et malveillante, typique des près de 600 notices qui entrent dans ce qu’il faut bien appeler une « liste noire » et qui doivent être analysées sous cet angle : non pas des « notices d’information », mais des notices de délation destinées à alimenter une chasse aux sorcières, et dont la réfutation « implique un investissement intellectuel souvent lourd et ingrat »et « particulièrement élevé ». En relisant L’opium des imbéciles, j’en suis arrivé à la conclusion surprenante que pas une seule phrase de cet ouvrage ne pouvait être considérée comme honnête, certaines d’entre elles comportant souvent plusieurs procédés frauduleux : mensonges, déformations, omissions, procès d’intention, effets de loupe, amalgames, invocations d’autorités en carton-pâte. A tel point que c’est bien plutôt la littérature anticomplotiste qui est une illustration parfaite de ce premier extrait, en n’y ajoutant que deux syllabes : « anti » en préfixe de « complotiste ». Il faut par ailleurs rappeler que Rudy n’entre jamais dans le détail des œuvres ou interventions des lanceurs d’alerte qui ont le bonheur de se voir gratifiés d’une « notice » sur Conspiracy Watch (à moins il est vrai qu’il s’agisse d’erreurs, inévitables, commises à un moment ou à un autre par les intéressés, comme il lui arrive très souvent de commettre lui-même ; ou si d’une façon ou d’une autre ça peut leur nuire) : cette accusation est donc purement gratuite et malveillante, et est manifestement calquée sur les propres « exagérations, boniments, mensonges,spéculations oiseuses et contrevérités dont [il] truffe ses propos ».

2) « La critique du complotisme est un sport de combat dans lequel il n’y a presque que des coups à prendre, le plus souvent en-dessous de la ceinture. Intimidations, insultes, calomnies, rumeurs malveillantes, procès d’intention sont le lot de ceux qui montrent un peu trop de pugnacité dans cette lutte qui se pratique à un contre mille avec une main attachée dans le dos. » L’opium des imbéciles, p.159

Les coups dont parle ici Reichstadt ce sont les tombereaux de commentaires négatifs et sarcastiques (« Rudy rends l’argent ! ») qui s’abattent sur lui comme la grêle à chaque fois qu’il se manifeste sur Tweeter, ou dans des webémissions postées sur You Tube. En vérité ce sont des coups bien gentils en comparaison de ceux qu’il mériterait vraiment pour l’ensemble de son œuvre. Par ailleurs il ne joue pas « à un contre mille une main attachée dans le dos », puisque depuis dix ans il a pu débagouler son baratin, ses amalgames, dénonciations, appels à la répression des « complotistes », dans des centaines d’articles et d’émissions où il était reçu dans un fauteuil, dans la totalité des médias de la presse écrite et du PAF. C’est du reste pour cette raison qu’il se plaint si amèrement du sort qui lui est réservé sur les réseaux sociaux, où la servilité à son endroit n’est pas de mise. Ajoutons que ses deux ouvrages et ses pseudo notices d’informations financées par le fonds Marianne, comme nous l’avons démontré dans le précédent article passant au crible ma propre notice, sont truffées d’« insultes, calomnies, rumeurs malveillantes et procès d’intention » envers les « complotistes ».

3) « Ce qui me vaut d’être dans le collimateur de leurs promoteurs ne fait aucun mystère pour moi. J’ai contribué à percer à jour leur malhonnêteté, j’ai dérangé leur business de bonimenteurs professionnels. Qu’ils me combattent, je n’en attends pas moins. Mais sont-ils obligés de s’avilir un peu plus en le faisant ? Il est pénible d’être attaqué par une personne à qui vous reconnaissez des qualités. Il est juste fatigant de l’être par des individus insignifiants, souvent anonymes, et pour lesquels vous n’avez aucune estime. » Au cœur du complot, p.91

Le scandale du fonds Marianne a confirmé – si besoin était – que c’était lui qui était malhonnête et menait un business de bonimenteur professionnel. Rudy Reichstadt touche 60 000 euros par ans de la part du CIPDR depuis le lancement de l’appel à projets en avril 2021. Il est également financé par la DILCRAH, la FMS et la fondation Jean Jaurès. Il a pu se payer à l’âge de 35 ans une maison d’une valeur 524 000 euros dans une banlieue huppée de la région parisienne. En comparaison les revenus des « complotistes », dans l’immense majorité des cas, sont dérisoires sinon inexistants. On notera encore cette fâcheuse tendance de structure raciste à mettre tout le monde dans le même sac, comme si tous les complotistes émargeaient au même confortable revenu universel. Et c’est lui qui nous fatigue, par son insignifiance, ses jérémiades, sa malveillance, sa nuisible omniprésence, ses incessants appels à la répression… Il est vraiment pénible d’être continuellement attaqué par une personne à qui nous ne reconnaissons presque aucune qualité et pour lequel nous n’avons aucune estime.

4) Dans le même genre on pouvait lire, dans l’opium des imbéciles (p.20) : « Une très prospère économie du complotisme s’est ainsi mise en place ces dernières années. Elle a ses commanditaires, ses laborantins, ses dealers, ses consommateurs occasionnels et ses junkies. »

Au-delà du caractère haineux et insultant de la métaphore filée, nous nous répétons, le milieu dit complotiste est un milieu où presque tout le monde tire le diable par la queue, à la différence des acteurs anticomplotistes qui sont confortablement rémunérés par l’État et bénéficient d’une publicité gratuite de leurs travaux – presque toujours médiocres – dans tous les médias de masse qui leur déroulent à tout coup le tapis rouge. Le scandale du fonds Marianne a également mis en lumière (reformulation) « une très prospère économie souterraine des associations anticomplotistes vivant grassement de subventions publiques dans l’opacité dans la plus totale à la façon des dealers et des junkies qui se livrent à leurs vices et trafics aussi loin des regards que possible. »

5) « [à propos d’un platiste célèbre] Lorsqu’on l’entend débiter sans contradicteur sottises sur sottises, on ne peut toutefois s’empêcher de penser que la sollicitude la plus élémentaire serait de le ramener sur Terre, et que c’est une étrange conception de l’amitié que de laisser son prochain perdre pied avec le réel sans rien tenter pour l’en empêcher. » L’opium des imbéciles, p.158

On peut dire exactement la même chose de lui à chaque fois qu’on le voit baratiner le même discours sur un plateau de télévision, parfois à une heure de grande écoute, face à un journaliste d’une servilité à toute épreuve, sans jamais avoir été confronté une seule fois à un contradicteur en près de dix ans d’activité, où il peut débiter impunément non seulement « sottises sur sottises », mais injures, calomnies, procès d’intention et amalgames infamants. Et nous aimerions qu’un jour quelqu’un lui fasse « la sollicitude la plus élémentaire de le ramener sur Terre », afin de l’empêcher de « perdre pied avec le réel ».

6) « Il existe un monde souterrain où les délires pathologiques, déguisés en idées, servent à des escrocs et à des fanatiques semi lettrés pour exciter les masses ignorantes et superstitieuses. » Au cœur du complot, p.152

C’est une excellente définition de l’ensemble de la mouvance anticomplotiste dont il est la figure de proue, et plus généralement du pouvoir profond qui tire aujourd’hui les ficelles d’une « République française » dévoyée. Pas un mot à changer ici !

7) « Le même phénomène est observable sur la complosphère : les théories du complot les plus saugrenues y sont allègrement développées tout au long de l’année mais l’hypothèse selon laquelle le Kremlin aurait pu influencer les élections américaines est rejetée avec la dernière énergie, malgré les éléments accablants qui ont été portés sur la place publique. Comment comprendre ce paradoxe ? En commençant par comprendre qu’il n’en est pas un. Que le conspirationnisme est aux antipodes du doute méthodique et du libre examen et qu’il demeure, en toutes circonstances, éminemment sélectif. » L’opium des imbéciles, p.76

Et une page plus loin il renchérit en pointant les « indices accablants qui ont pu être recueillis au fil des mois d’une tentative du gouvernement russe d’influer sur l’issue du scrutin ayant permis à Donald Trump d’accéder à la Maison blanche. »

commentaire : Avec le recul, il est à présent avéré que le Russiagate (la théorie du complot du financement de la campagne de Donald Trump par la Russie en 2020) n’a jamais existé, et qu’on doit la considérer aujourd’hui comme une théorie du complot qui a été quotidiennement colportée sans vergogne par les médias de deux côtés de l’Atlantique, du premier au dernier jour du mandat de Donald Trump, afin de lui rendre la vie et l’exercice du pouvoir impossible1. Il est remarquable que Rudy Reichstadt ait aveuglément colporté cette grossière fake new pendant quatre ans, se murant dans le silence une fois celle-ci définitivement éventée en novembre 2021, continuant imperturbablement par la suite pendant trois ans jusqu’à nos jours, semaine après semaine, en bon militant du parti démocrate, à accuser Trump et ses partisans d’être des complotistes invétérés2. En miroir, il nie systématiquement que les États-Unis puissent influer sur des élections partout dans le monde, fomenter des révolutions colorées, participer à des renversements de présidents démocratiquement élus, organiser l’assassinat de dirigeants étrangers, ou alors les excuse et les minimise quand les preuves sont accablantes. De même, malgré une pléthore d’« éléments accablants », Rudy a toujours nié, et nie encore catégoriquement que les démocrates aient pu voler l’élection de 2022 qui a porté le sénile Joe Biden au pouvoir. Bref, en changeant le mot-clé dans la dernière phrase du premier extrait, il est évident que « l’anticonspirationnisme est aux antipodes du doute méthodique et du libre examen et qu’il demeure, en toutes circonstances, éminemment sélectif. »

8) « A l’heure des réseaux sociaux, les théories du complot surgissent désormais instantanément dans l’espace public. Elles suivent invariablement de quelques minutes, voire de quelques secondes, l’annonce de tout événement particulièrement marquant. Pourquoi cette rapidité ? La première hypothèse, d’ordre psychologique, est que le complotisme serait devenu, chez beaucoup, un automatisme, une sorte de réflexe pavlovien. Cette explication se conjugue avec une seconde, d’ordre stratégique : les théoriciens du complot et leurs auxiliaires ont compris que les premiers instants qui suivent l’annonce d’une nouvelle – spécialement lorsque elle est choquante et traumatisante – correspondent à un moment de sidération, donc de vulnérabilité, de fragilité, dont il est impératif de profiter. » L’opium des imbéciles, p.49

La culture du mensonge et de la manipulation des pouvoirs des « démocraties occidentales » étant à ce point devenue proverbiale, et l’avènement d’internet et des réseaux sociaux ayant enfin permis à l’information de circuler de façon horizontale, en contournant les gatekeepers, il est compréhensible que dans une toute partie de la population, des réflexes de méfiance spontanée se déclenchent instinctivement à chaque « événement particulièrement marquant », et inévitable que chez certains cette méfiance atteigne un degré excessif. Mais ne peut-on pas dire la même chose de toutes ces versions officielles éclairs qui surgissent tout aussi rapidement, comme si elles faisaient partie de l’événement lui-même (cas de la profanation du cimetière de Carpentras le 8 mai 1990, des attentats du 11 septembre 2001, du massacre chimique de la Ghouta en Syrie du 21 août 2013, du massacre de Charlie Hebdo du 7 janvier 2015, de l’opération déluge d’al Aqsa du 7 octobre 2023, de la mort de l’« opposant » russe Alexei Navalny le 16 février 2024, etc.) ? Ces versions officielles éclair présentent en outre un trait qui les distingue des mouvements spontanés de scepticisme que Reichstadt dénonce : surgies dans les minutes, les heures, jamais plus de quelques jours après l’événement, elles sont aussitôt avant toute enquête gravées dans le marbre pour l’éternité ; tandis que les interprétations « complotistes » s’ajustent naturellement avec le temps, à mesure que des éléments nouveaux deviennent disponibles à l’examen – processus naturel de toute investigation menée dans les règles de l’art. Du point de vue « stratégique », maintenant, n’est-il pas flagrant que c’est bien plutôt le pouvoir et ses marionnettistes qu’il faut accuser de « profiter » de ces premiers instants cruciaux, où nous sommes sidérés et donc vulnérables, pour amalgamer à l’événement « traumatisant » la version officielle calibrée exprès pour mouler et figer les esprits dans la forme voulue, en fonction des objectifs politiques auxquels la version officielle doit servir, par exemple rendre acceptables la promulgation dans l’urgence d’une loi inique et liberticide, le déclenchement d’une guerre ou d’une campagne de bombardements, ou la diabolisation d’un dirigeant, d’un parti, d’un peuple ou d’une religion ?

9) « l’imposture complotiste est une opération de falsification du réel menée au nom de la vérité. C’est une entreprise charlatanesque de subversion de la Liberté travestie en projet d’émancipation. » L’opium des imbéciles, p.12

Un seul mot ici encore à changer : « l’imposture anticomplotiste est une opération de falsification du réel menée au nom de la vérité. C’est une entreprise charlatanesque de subversion de la Liberté travestie en projet d’émancipation. » La citation se trouve au cœur de la zone de 50 pages initiales de l’ouvrage qui comporte deux injures et propos haineux par page en dehors de toute base factuelle.

10) « la dénaturation des propos et l’extrapolation des faits comptent parmi les méthodes de manipulation les plus prisées par les désinformateurs conspirationnistes. » L’opium des imbéciles, p.64

Un seul mot ici encore à changer : « la dénaturation des propos et l’extrapolation des faits comptent parmi les méthodes de manipulation les plus prisées par les désinformateurs anticonspirationnistes » Les centaines de « notices d’information » (Cf article précédent) – financées par le fonds Marianne – dénonçant publiquement telle ou telle figure, média, parti, structure critique du pouvoir et des médias en sont autant d’illustrations éclatantes.

11) « la petite engeance des professionnels du complotisme n’a aucun scrupule à accuser ceux qui les combattent de ses propres forfaits. » L’opium des imbéciles, p.46

Un seul mot ici encore à changer : « la petite engeance des professionnels de l’anticomplotisme n’a aucun scrupule à accuser ceux qui les combattent de ses propres forfaits. » Il était prévisible, au bout d’un moment, que les acteurs anticomplotistes se missent à accuser leurs ennemis de procéder à des inversions accusatoires, ce trait ayant été identifié à la longue comme leur marque de fabrique, leur signature, et de plus en plus mis en avant par leurs contradicteurs : l’inversion accusatoire est utilisée par les acteurs AC comme une martingale qui finit naturellement par s’étendre à l’inversion accusatoire elle-même. Précisons qu’il n’existe pas de « professionnel du complotisme » mais que les professionnels de l’anticomplotisme – tels Rudy Reichstadt – existent et en vivent fort bien, qui plus est avec de l’argent pris dans nos poches.

12) « La spécificité de la Théorie du Complot est de formuler une accusation infalsifiable, c’est-à-dire s’affranchissant des modalités légitimes d’administration de la preuve telles qu’elles sont en vigueur dans les instances de production du vrai. » L’opium des imbéciles, p.33

Nota bene : le terme « infalsifiable » renvoie à un critère mis en avant par le philosophe Karl Popper pour distinguer les croyances des théories scientifiques. Les premières, la plupart du temps, ne comportent pas d’élément susceptible de la réfuter rationnellement, tandis que les secondes, basées sur des éléments concrets, et faisant des prédictions vérifiables par l’expérience, sont submissibles à l’épreuve de la réfutation. Le terme « infalsifiable » est un anglicisme impropre qui doit être entendu dans le sens de « dont on ne peut prouver la fausseté », ou « qui ne donne aucune prise à la réfutation ».

Je renvoie le lecteur aux blogs, sites, ouvrages, déclarations des personnes dénoncées sur la liste noire de Conspiracy Watch, par exemple mon site internet, qui recense toute ma production depuis 2010 : c’est d’une insigne malhonnêteté que de proférer ce genre d’accusation collective sans citer le moindre nom ni le moindre travail. Cette phrase est en revanche une excellente définition d’un des aspects de la méthode AC : comme ses tenants ne vont que très rarement dans le détail des faits et des carrières, leurs tombereaux d’injures et d’analyses ne reposent en fait sur rien de concret. On peut être d’accord ou pas avec eux, mais leurs accusations ne reposent sur rien qui soit falsifiable ou réfutable. Les 50 premières pages de L’opium des imbéciles sont à cet égard exemplaires : il est difficile de réfuter un anticomplotiste, car ses bordées d’injures et d’insinuations n’ont la plupart du temps aucun enracinement concret dans la réalité.

13) « L’opium complotiste nous donne l’illusion de planer au-dessus des faits sans jamais pouvoir être atteints par eux. » L’opium des imbéciles, p.19

Variation de l’extrait précédent : c’est bien au contraire l’une des caractéristiques cardinales du discours anticomplotiste que d’éviter soigneusement de s’aventurer dans le détail des faits, de s’en tenir à aussi grande distance que possible, et pour cause : évoquer les faits d’un peu trop près c’est courir le risque de proférer des contre-vérités flagrantes, pour le coup réfutables. Ou alors on choisit soigneusement la poignée d’affaires où l’on est à peu près sûr de son coup, ce qui n’est pas sans risque dans tous les cas. Lisez par exemple ce crash monumental à la page 130 de L’opium des imbéciles (il est question de la version officielle des attentats du 11 septembre 2001) : « Certes Fisk n’est pas un spécialiste des crashs d’avion ou des effondrements de bâtiments. Mais rien ne l’empêchait de se documenter. Il se serait alors aperçu que des débris d’avion du Pentagone il y en a ; que l’acier n’a pas besoin d’atteindre son point de fusion (c’est à dire la température où il devient liquide) pour céder mais simplement de perdre une part importante de sa solidité ; que le troisième immeuble du WTC (7) s’est effondré après avoir été éventré sur de nombreux étages au terme d’un gigantesque incendie de plusieurs heures. » Tout est faux – et partiellement négationniste – dans cette mise au point pour les nuls : 1) Pas plus que Fisk, Rudy Reichstadt n’est un spécialiste des crashs d’avion ou des effondrements de bâtiments, et il serait intéressant de savoir lui-même s’est documenté. 2) Il n’existe vraiment aucun débris évident d’avion sur le site du Pentagone3. 3) Au moment des crashs des tours jumelles, les incendies étaient pratiquement éteints et à supposer que l’acier eût effectivement molli, demeurait la totalité des soubassements qui étaient intacts et auraient dû résister. 4) La tour WTC7 n’a jamais été « éventrée » sur de nombreux étages et aucun gigantesque incendie n’a pu y être constaté4. Bref, pour l’acteur anticomplotiste, le terrain des faits est une zone hautement radioactive dans laquelle il n’est jamais bon de s’aventurer et demeurer trop longtemps. En revanche la martingale de l’inversion accusatoire peut toujours être employée à discrétion, à savoir accuser ses adversaires de « planer au-dessus des faits ».

« rien ne l’empêchait de se documenter. Il se serait alors aperçu que des débris d’avion du Pentagone il y en a » 🙂
Document de synthèse produit par l’es architectes et ingénieurs de l’association AE911, qui résume les principaux éléments concernant le WTC7.
« Pour l’acteur anticomplotiste, le terrain des faits est une zone hautement radioactive dans laquelle il n’est jamais bon de s’aventurer et demeurer trop longtemps. » A bon entendeur 😉

14) « Les extrémistes sont, par définition, des gens bardés de certitudes. La ferveur qu’ils mettent dans leurs affirmations, leur apparente confiance en eux et leur absence de doute ont pour effet d’asseoir leur pouvoir de conviction. » Au cœur du complot, p. 80

Rudy Reichstadt veut à toute force se persuader que le monde est divisé en deux camps, les gentils et bienfaisants États-Unis d’Amérique, phare de la démocratie, et les méchants individus et pays qui rechignent à reconnaître le caractère divin de la lumière projetée dans tout l’univers par ce phare politique de l’humanité. Selon lui les États-Unis et Israël, les deux États les plus moraux du monde – pour paraphraser l’un de ses cousins Meyer Habib – sont incapables – pour des raisons éthiques – de fomenter des complots, des opérations sous faux drapeau, des crises financières, des assassinats de dirigeants étrangers. Dans un autre domaine (auquel il ne connaît rien) il est persuadé depuis toujours5 que les multinationales pharmaceutiques sont des organisations philanthropiques dont les vaccins sont des sortes d’hosties miraculeuses à l’efficacité indubitable – la crise du Covid et la gestion de la crise sanitaire par le pouvoir n’ayant fait que l’affermir dans sa foi. Quand il exprime ce genre de conviction, il s’exprime avec ferveur, une étonnante confiance en lui, une complète absence de doute, et quand le temps lui démontre qu’à l’évidence il s’est trompé dans les grandes largeurs – ce qui arrive très souvent – jamais il ne reconnaît ses erreurs, s’il s’agit seulement d’erreurs… Par conséquent, Rudy Reichstadt, selon sa propre définition, est un « extrémiste ».

15) « Le discours complotiste use d’artifices pour brouiller le réel. On ne comprend rien au complotisme si l’on ne saisit pas qu’il est une entreprise visant à altérer notre perception de la réalité en vue de lui en substituer une autre. Tout antisystème n’a qu’un seul rêve qui est de remplacer le système par un système plus conforme à ses intérêts. Pour ce faire, les complotistes s’attachent à rendre complexe ce qui est simple et simple ce qui est compliqué. A minimiser, nier ou méconnaître massivement des éléments cruciaux portant sur des questions auxquelles ils entendent apporter leur contribution, et, en même temps à monter en épingle des broutilles, des points tout à fait secondaires voire anecdotiques. D’où leur dilection pour les pseudo scandales, affaires artificielles, tuyaux percés, « révélations », le suffixe « gate » (comme dans « watergate« ) et toute la gamme des faux scoops. » Au cœur du complot, p.83

Si l’on remplace dans cet extrait (termes soulignés) « complotiste » par « médiatique », « complotisme » par « médias », « antisystème » par « agent du système », « système » par « ordre naturel » on obtient un excellent résumé de la façon dont fonctionne le prisme délibérément déformant du système médiatique, jusqu’à l’usage effréné du suffixe « gate » pour désigner toute une batterie de « pseudo-scandales » (le « Russiagate » étant un excellent exemple !). Reformulons donc : «  Le discours médiatique use d’artifices pour brouiller le réel. On ne comprend rien aux media si l’on ne saisit pas qu’ils participent d’une entreprise visant à altérer notre perception de la réalité en vue de lui en substituer une autre. Tout agent du système n’a qu’un seul rêve qui est de remplacer l’ordre naturel par un système plus conforme à ses intérêts. Pour ce faire, les media s’attachent à rendre complexe ce qui est simple et simple ce qui est compliqué. A minimiser, nier ou méconnaître massivement des éléments cruciaux portant sur des questions auxquelles ils entendent apporter leur contribution, et, en même temps à monter en épingle des broutilles, des points tout à fait secondaires voire anecdotiques. D’où leur dilection pour les pseudo scandales, affaires artificielles, tuyaux percés, « révélations », le suffixe « gate » (comme dans « Russiagate« ) et toute la gamme des faux scoops. »

16) « Parce qu’on comprend mieux la facilité avec laquelle le complotisme peut, aux yeux de l’opinion, transformer un honnête homme en crapule et faire d’un innocent un coupable, parce qu’on en éprouve aussi toute l’injustice, on fraternise inévitablement, dans le secret de sa conscience, avec ces innombrables boucs émissaires sur lesquels, depuis des temps immémoriaux, s’est concentrée la haine grégaire. Ainsi qu’avec tous ces médecins diffamés, journalistes calomniés, élus voués aux gémonies. C’est pour eux que je voudrais témoigner ici. » Au cœur du complot, p.28

Désargenté, marginalisé, diabolisé, persécuté, le « complotisme » dispose de moyens absolument dérisoires pour réaliser mener – en dehors du monde virtuel – des opérations de cette espèce. C’est en revanche tout à fait typique de la secte anticomplotiste et du complexe médiatique – dans le monde réel – que de « transformer un honnête homme en crapule et faire d’un innocent un coupable », par le truchement des médias et de la justice, et tellement systématique qu’on peut enchérir « transformer tout honnête homme en crapule et tout innocent en coupable. » Et n’est-il pas symptomatique qu’il fasse implicitement référence, pour illustrer son propos, au cas de ces médecins de plateaux corrompus, perclus de conflits d’intérêt, qui ont soutenu automatiquement toutes les inhumaines mesures sanitaires gouvernementales pendant toute la durée de la crise du Covid, quand les médecins courageux qui prétendaient prescrire des traitements beaucoup moins coûteux, beaucoup plus raisonnables, se trouvaient impitoyablement ostracisés, transformés en boucs émissaires, traînés devant le conseil de l’ordre des médecins, et pour les plus déterminés d’entre eux purement et simplement radiés ? Rapplons que de très nombreuses notices d’information de délation infamantes produites par Conspiracy Watch sont consacrée à ces médecins « honnêtes » et « innocents ».

17) « Ne nous y trompons pas : ceux qui dénoncent le plus bruyamment les « chasses aux sorcières » imaginaires dont ils seraient le gibier ne revendiquent pas le droit de douter ou de se tromper, mais le privilège de ne pas être tenus responsables de leurs actes et de leurs paroles. » Au cœur du complot, p.89

Tout le second livre de Rudy Reichstadt est une insupportable jérémiade dans laquelle il se lamente sur son pitoyable sort de chasseur de conspis injustement lynché sur les réseaux sociaux à chacun de ses gazouillements, jusqu’à clore son ouvrage sur une sorte de chantage au suicide – alors qu’il ne fait que recevoir la monnaie de sa pièce pour son rôle de premier plan dans des chasses aux sorcières qui n’ont rien d’imaginaires, comme en témoigne la liste noire de Conspiracy Watch où se trouvent fichés dans des « notices » des centaines de « complotistes ». Et une expérience de plus de dix années montre que s’il y en a un qui « revendique le droit d’être sûr de lui et de ne jamais se tromper », et qui jouit – sans même avoir à le revendiquer – du « privilège de ne pas être tenu responsable de (se)s actes et de (se)s paroles », c’est bien lui et ses frères et collègues du complexe médiatique et anticomplotiste – puisque pour travailler comme « journaliste » dans les médias il faut être AC, et que participer sans états d’âme à la croisade AC à un certain niveau ouvre mécaniquement toutes les portes des médias.

18) « Et puis, comme aux plus belles heures du Maccarthysme, ils se mettent à dresser des listes. Des listes de suspects nominatives où de fausses informations fusionnent joyeusement. » Au cœur du complot, p.96

Une grande partie de l’activité de Conspiracy Watch, financée par le fonds Marianne à travers le projet « Riposte6 », consiste à « dresser des listes de suspects nominatives où de fausses informations fusionnent joyeusement ». Et ces dernières années, Rudy Reichstadt n’a eu de cesse d’appeler à une sévérité et une répression accrue des ennemis politiques de sa secte (c’est là en fait tout bien pesé le véritable sens de « complotistes »), en appelant de ses vœux une évolution de la législation pour pouvoir les traîner plus facilement devant les tribunaux.

19) « Peut-on soutenir sérieusement qu’il suffirait d’intégrer sans réserve les partisans de la théorie du complot dans le champ du débat public légitime pour résoudre le problème ? N’est-ce pas essayer d’éteindre un incendie avec de l’essence ? En réalité, les conspirationnistes ont accès aux médias mainstream bien plus souvent qu’à leur tour. Sur Internet, le rapport des forces tourne clairement à leur avantage. Et régulièrement, des théories du complot sont diffusées, sans contrepoint critique, sur des chaînes de télévision conventionnelles. » article publié sur le Huffington Post le 1er mars 2016

Pour une fois je fais exception à la règle en citant un extrait d’article publié sur le site du Huffington Post en 2016, intitulé « Refuser de débattre avec les conspirationnistes renforce-t-il le conspirationnisme ? ». Rudy Reichstadt ose proférer semblable thèse dans ses deux ouvrages, mais pas de façon aussi ramassée et caricaturale. On notera pour commencer la posture fondamentalement antidémocratique du refus de tout débat, exprimée de la part de quelqu’un qui n’a été élu par personne et qui n’a acquis son éminente position – et les grasses rémunérations qui vont avec – que par copinage et affinités idéologiques. On peut inverser les trois questions liminaires en postulant qu’« exclure sans réserve les acteurs anticomplotistes du champ du débat public légitime consisterait un premier pas salutaire dans la résolution du péril mortel auquel les populations française et européenne sont confrontées ». Il faut par ailleurs un culot hors du commun pour oser écrire que les complotistes bénéficieraient du soutien voire de la complicité des media. Dans l’ouvrage que je lui ai consacré, je retrace son extraordinaire montée en puissance médiatique, avec celle de tous ses frères AC, depuis 2014 – les « conspirationnistes » n’ayant quant à eux qu’un accès extrêmement limité aux médias, cet accès tendant vers zéro en ce début d’année 2024. On relève tout de même au milieu de l’extrait une phrase honnête qui permet de comprendre pourquoi les mesures de contrôle d’internet se sont accrues et multipliées ces dernières années : pour que la victoire soit complète il faut que la prison globale s’étende à cet ultime espace de liberté qu’est internet.

20) « le complotisme confine à plus d’un titre au complot : comme stratégie – politique, économique, idéologique… – de brouillage des connaissances et de l’information par le doute, sous la forme d’opérations de manipulation pouvant évidemment s’apparenter à des complots. » L’opium des imbéciles, p. 24

Il s’agit d’une accusation que Rudy Reichstadt ne manque jamais de porter lors de ses intervious, et c’est la conséquence ultime de la posture générale dans laquelle il a décidé de se figer – tel un PNJ de jeu vidéo7 – jusqu’à la fin de ses jours : les complotistes, finalement, doivent être impliqués dans une vaste conspiration visant à renverser l’ordre existant. L’ironie n’est-elle pas extraordinaire ? Pour dénigrer ses ennemis, il en vient finalement à adopter envers eux une posture typiquement et ouvertement « complotiste », au sens anticomplotiste du terme ! Le présupposé implicite de cette accusation est que l’ordre existant – la République avec ses Valeurs, la Démocratie, les Droits de l’Homme que l’on répand de par le monde à travers des campagnes de bombardement massives – est d’une perfection achevée et doit demeurer tel jusqu’à la fin des temps : or le point de vue de la majorité de la population est tout autre, en partie ceux qui ont à subir le dénigrement, la censure, l’ostracisme, la répression, le licenciement, les persécutions politiques et judiciaires iniques : ceux-là veulent tout naturellement être mieux considérés, faire entendre leur voix et changer l’ordre existant dans le sens du bien commun, et il est non seulement logique, mais légitime qu’ils finissent par s’associer en vue de créer un mouvement révolutionnaire, de la même façon qu’un groupe de gens honnêtes injustement jetés dans la même prison s’efforceraient par tous les moyens de mutualiser leurs efforts pour retrouver leur liberté ! Ajoutons, pour revenir à l’extrait cité, que c’est Rudy et ses frères et sœurs des hauts plateaux républicains qui participent « au brouillage de l’information, sous la forme d’opération de manipulation pouvant évidemment s’apparenter à un complot ». C’est d’une logique implacable : si l’on peut comme lui désinformer continûment et impunément pendant des années dans des proportions aussi énormes, en étant reçu dans tous les médias, toujours en compagnie des mêmes « frères » et sans jamais de contradicteur, tout en étant de plus en plus grassement rémunéré par l’État, cela veut dire qu’il participe lui-même à une conspiration multiforme, sa fonction consistant à ficher et diaboliser les opposants, à empêcher tout débat, et à recommander la répression accrue de ceux qui ont mis à nu et n’ont de cesse de dénoncer cette conspiration.

1Nous renvoyons le lecteur à deux articles de l’Observatoire du journalisme (ojim.fr) : « Russiagate : la megafakenews dont personne ne répond » (21 décembre 2021) ; « Russiagate : retour sur une machination politico-médiatique » (25 mai 2023).

2Sur le sujet de l’incroyable aveuglement de l’ensemble de la mouvance anticomplotiste relativement à la théorie du complot du Russiagate, on lira également avec profit l’article publié par Laurent Dauré sur le site Acrimed le 10 mars 2021, intitulé « Quand les « complotologues » de France Info font l’impasse sur la principale théorie du complot de l’ère Trump ».

3Et ce n’est pas la seule anomalie. Jouez au « jeu des sept erreurs » pour vous en convaincre ! Sur ce coup Thierry Meyssan et le Réseau Voltaire ont vu juste.

4Au sujet de « l’effondrement magique de la tour 7 », nous renvoyons au dossier réalisé par l’association reopen911, qui sur ce point a produit un travail remarquable.

5Il est troublant de relever, dès l’année suivant la création de son blog en 2007, sur le site du Courrier international, des articles s’émouvant de ce que des individus et groupes puissent manifester de la méfiance et de l’hostilité envers les campagnes de vaccination de masse.

6Lors de son audition devant la commission d’enquête sénatoriale, le 30 mai 2023, Rudy Reichstadt s’est ainsi expliqué sur la nature de ce projet : « Nous avons commencé à prendre contact avec le CIPDR en 2018 et ces échanges se sont traduits par une demande de subvention formulée en 2019. Un premier financement a ainsi été obtenu pour le projet expérimental « Riposte », seul projet cofinancé par le CIPDR. Riposte consiste à percer les bulles de filtres dans lesquelles sont enfermés les internautes, en les exposant à la diversité informationnelle, grâce au « pre-bunking ». L’objectif est que lorsque des gens recherchent des termes liés à la culture complotiste tels que « nouvel ordre mondial », « great reset » ou « État profond », ainsi que des noms de médias complotistes notoires, ils trouvent d’abord des contenus produits par notre rédaction. Dans cette optique, nous produisons des notices d’information très documentées, sourcées et informées, qui sont régulièrement mises à jour et que nous poussons via des coupons publicitaires mis à notre disposition – notre association étant à but non lucratif –, dans le cadre du programme Google Ad Grants. » Nous renvoyons à la vidéo intégrale de son audition, l’extrait précédent se situe à 21 minutes 50.

7Les PNJ, ou (Personnages Non Jouables), sont des personnages que l’on peut rencontrer au cours dans certains jeux vidéo, le plus souvent d’aventure-action (Zelda, GTA, Baldur’s Gate, Resident Evil). Ce sont en quelque sorte des éléments de décor qu’ils contribuent à rendre crédible avec lesquelles on peut interagir de façon minimale. Peu élaborés, ils se caractérisent par une gestuelle et des déplacements stéréotypés et des répliques et réparties immuables d’un bout à l’autre de la quête.

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